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La deuxième mort de Léon : le soldat inconnu
Albert Hilbold, Jérome Do Bentzinger, 2011
Recensé par Dominique Rosenblatt
Le texte de cette « recherche de la vérité perdue » permet de lire le travail d’élucidation d’une plume psychanalyste alsacienne, protestante, et enseignante.
Albert Hilbold émaille son récit d’expressions rurales, et précise les lieux en leur donnant les noms dialectaux.
Untel a été ìn de Partei, (affilié au parti nazi), ìm Kriej, (soldat), plus rarement unterm Hitler, au temps d’Hitler, en général accompagné d’une réflexion sécuritaire (« et sous Hitler, au moins, il y avait de l’ordre »), bi de Ditche, bi de Schwowe, un brin péjoratif,
« ce sont les seules expressions dont je me souviens pour désigner cette période, les seules aussi retrouvées aujourd’hui pendant cette investigation. » (p.59).
Il narre les secrets d’un village protestant, avec ses coutumes et son silence, il se souvient de ses impressions d’enfance, et cherche à les dépasser.
Pour cela, il interroge infatigablement, mu par le désir d’expliquer. Il lui faut entendre, sans juger, en accordant toujours à ses interlocuteurs des circonstances atténuantes, en montrant la complexité des situations dans les temps d’oppression.
Il s’interroge sur l’ironie et l’autodérision, qui recouvrent la volonté de ne pas dire la vérité, ni sur soi, ni sur les événements. L’ironie, de la sorte, devient le marqueur de la méconnaissance.
Kahwiller.
Quel K ? Le cas étudié ?
Selon Abraham et Torok, un secret indicible s’établit comme une crypte au sein du sujet perturbé par la contradiction entre le message explicite et le comportement de son milieu. Dans le récit, c’est un tunnel qui remplit cette fonction : une usine oubliée ouvre sur cette crypte, qui révèle des secrets bien cachés, mais qui suintaient.
Ironie de l’histoire : celui dont l’auteur cherche la trace, pseudo soldat qui va être célèbre parce qu’inconnu, c’est en réalité un prisonnier polonais évadé, tué par un Feldgendarm, devant la population désolée, quelques jours avant l’arrivée des Américains.
Sous le dispositif officiel, si on ne veut ni en rire ni en pleurer, ni adhérer, il reste l’affection au terroir, la fidélité aux anciens et à leur volonté maladroite, et au refus de la guerre dont la malédiction s’étend sur plusieurs générations.