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Gravelotte : un musée qui tombe bien
Si on quitte Metz par la route de Verdun, on monte sur un vaste plateau dénudé, austère, où eurent lieu trois effroyables batailles en août 1870, causant autant de victimes de part et d’autre malgré une victoire stratégique allemande : Gravelotte, Mars-la-Tour et Saint-Privat.
Ce secteur est truffé de cimetières et monuments allemands de 1870, bien plus nombreux que les monuments français. Une victoire est toujours plus commémorée qu’une défaite, on en voit un exemple. Ce plateau a été coupé en deux par la frontière de 1871, Mars-la-Tour restant français, bien que son nom soit très populaire dans le Kaiserreich grâce à une chanson de l’armée allemande…
Ce musée départemental entièrement consacré à la guerre de 1870 a été inauguré en 2014.
Le village de Gravelotte réserve des surprises. Si on se gare sur le parking à gauche de la route, le chemin qui indique le musée mène d’abord à la Gedenkhalle, un étrange monument dont le style néo-roman suffit à trahir son promoteur : le Kaiser Guillaume II, venu ici en 1905. Cette sorte de cloître est tapissée de plaques qui rappellent les noms des régiments qui ont servi ici. De là, on suit le chemin qui rejoint la route de Verdun, à travers un petit cimetière allemand. On traverse la route pour entrer dans le musée.
Ce musée départemental construit dans un style futuriste mais sobre a été inauguré en 2014 par tous les responsables politiques de Lorraine et de Moselle. Depuis quelques années, la Moselle tente de miser sur le tourisme culturel, le patrimoine industriel et la mémoire militaire sont ses deux atouts. Toutefois le premier musée de la bataille de Gravelotte, privé, avait été fondé en 1875, par deux villageois qui voulaient stocker les objets retrouvés dans les champs.
On est un peu déçu par le nom du musée « de l’Annexion et de la guerre de 1870 » à cause du mot « annexion » toujours utilisé par l’historiographie française pour désigner les conquêtes des Allemands, mais jamais celles des Français (1). On aurait pu le remplacer par « Reichsland » ou « Terre d’Empire ». Toutefois, à la différence du mémorial d’Alsace-Moselle de Schirmeck, qui est agressif et germanophobe (2), et malgré sa dénomination, le musée de Gravelotte respecte une stricte neutralité en présentant et analysant les faits. Il ne cherche pas à convaincre ni à dénoncer, mais à expliquer. De plus, il s’agit là du musée le plus important, qui soit entièrement consacré à la guerre de 1870.
Le musée suit une progression chronologique, partant des causes de la guerre, on en arrive aux batailles sur le sol mosellan, au siège de Metz et à son dénouement catastrophique à cause du maréchal Bazaine. La part belle est faite à tous les aspects lorrains de la guerre, mais ceux-ci sont reliés à ce qui se passe en France, en Allemagne et en Alsace. Les batailles du plateau de Gravelotte sont parfaitement décrites, mais aussi celle de Forbach.
La Gedenkhalle, un étrange monument dont le style néo-roman suffit à trahir son promoteur : le Kaiser Guillaume II.
A chaque étape sont exposés les armes, les uniformes, les plans, les cartes, les citations de témoins de toutes origines, et aussi de beaux tableaux d’Edouard Detaille, Alphonse de Neuville ou Anton von Werner (3), un poteau frontalier de 1871, des sculptures, un vitrail… Evitant les agressions sonores, le musée permet de lire et d’apprécier la beauté des œuvres dans une atmosphère calme.
Lors de ma visite en mai 2022, la boutique du musée, très riche, ne proposait pas encore les publications d’Unsri Gschìcht sur la question… mais je leur ai proposé de le faire.
(3) Pour les tableaux de maîtres illustrant ces batailles, voir aussi une des salles impressionnistes du musée d’Orsay.